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Fiction N°50 — janvier 1958

dimanche 5 octobre 2014, par Denis Blaizot

Fiction N°50
Janvier 1958

Sommaire :

  • Robert Sheckley : Invasion avant l’aube
  • Alain Dorémieux : La valse
  • Poul Anderson : Gangsters légaux
  • Jay Williams : Guerre froide
  • René Lathière : Les prisonniers
  • Robert Bloch : Si vous n’y croyez pas...
  • H. Kuttner et C. L. Moore : La machine à deux mains
  • Lee Corey : La route est ouverte

Et, bien sûr, les chroniques et critiques habituelles dont les réponses de Jacques Sternberg, Jacques Bergier et Gérard Klein à un article lapidaire contre la Science-Fiction de René-Marie Albérès (Faillite de la fiction scientifique ) publié dans Combat du 21 novembre 1957 1957 .

Mon avis : Je dois l’avouer : je ne lis que rarement les articles publiés dans un vieux numéro de Fiction ou Galaxie. Mais là, j’ai fait une exception pour les extraits de l’article d’Albèrés et les réponses de Sternberg, Bergier et Klein. Il est amusant de constater que G. Klein tient, près de 66 ans plus tard, à peu près le même discours que ce Albèrés. Hé oui, M. Klein, je pense, comme vous le pensiez en 1958 1958 à propos d’Albérès, qu’à lire n’importe quoi sans discernement il est normal que vous ayez une piètre opinion de la SF française [1]. Mais lui avait des excuses... si on peut appeler cela des excuses :

  1. En 58, il n’y avait pas de différence de faite entre Science-Fiction et fiction scientifique. Il me semble pourtant que la fiction scientifique ne peut pas se permettre les approximations de la science-fiction. Je m’explique sur cette nuance avec deux exemples du cinéma : Starwars relève du domaine de la science-fiction. L’auteur a tous les droits du moment que son ensemble est cohérent. Il n’a pas à expliquer comment peuvent bien fonctionner ses vaisseaux spatiaux. Par contre Gravity relève de la fiction scientifique. L’auteur n’a pas le droit de ne pas respecter les connaissances scientifiques dûment vérifiées. Et de ce point de vue, Albérès a parfaitement raison. Il y a plus souvent du mauvais que du bon dans la fiction scientifique.
  2. il n’était pas directeur d’une prestigieuse collection de Science-Fiction. Et en tant que tel, vous devriez savoir, vu le nombre d’années que vous travaillez dans ce milieu, que ce ne sont pas forcément parmi les écrivains les plus connus qu’on trouve les meilleurs. Je vous invite à vous procurer l’anthologie Dimension système solaire publiée par Rivière blanche. Vous y découvrirez quelques perles qui auraient leur place dans une anthologie publiée dans votre collection Ailleurs et demain Ailleurs et Demain Ailleurs et Demain est une collection française de science-fiction grand format publiée aux éditions Robert Laffont. Elle est dirigée depuis sa création en 1969 par Gérard Klein. La collection n’est pas numérotée, et inclut, en marge de la collection principale, trois séries : « Classiques », « Essais » et « L’écart », cette dernière n’incluant qu’un seul volume.
    Jusque dans les années 1990, cette collection était reconnaissable à ses couvertures gris argenté ou cuivrées, irisées de motifs abstraits. Depuis cette date, les présentations ont évoluer, sans changer de format, pour revenir récemment à la présentation d’origine caractéristique de la série.
    .

Soyons honnête : c’est avant-tout pour les nouvelles de Robert Bloch et Robert Sheckley que j’ai acheté ce numéro de Fiction. Mais au final ce sont toutes les nouvelles qui m’ont plu.

Dans Invasion avant l’aube, Robert Sheckley traite d’une méthode peu orthodoxe de coloniser une planète. Méthode qui s’avère peu efficace mais non mortelle... c’est déjà ça. Comme à l’accoutumée avec les œuvres de Sheckley, l’humour est présent.

Alain Dorémieux, quant à lui, nous propose avec La valse un conte fantastique digne des meilleurs. Le héros écoute une valse et entre en résonance avec celle-ci au point de ne plus vivre que pour elle, à s’isoler jusqu’à ce qu’on le retrouve mort de ce qui semble être un arrêt cardiaque. Très réussie, elle me donne vraiment envie de lire ou relire quelques autres œuvres de cet écrivain français.

La nouvelle de Poul Anderson, Gangsters légaux, a malheureusement vieilli. Elle fait très film de gangster des années 50, et pas forcément des meilleurs. C’est dommage. L’idée est originale et le style de l’auteur plutôt sympa.

C’est la situation politique internationale qui a donné son titre... et son thème à la nouvelle de Jay Williams : Guerre froide. Mais qu’on ne s’y trompe pas. C’est une nouvelle fantastique et un tant soit peu humoristique. Un homme d’un certain âge s’installe à la campagne mais entre très vite en conflit avec sa voisine qui semble faire usage de sorcellerie. Notre héros a, lui aussi des capacités de ce côté-là. Quand l’un souffle le froid, l’autre souffle le chaud. Mais ils finissent par trouver un terrain d’entente.

Profitez de cette perle. René Lathière n’a apparemment publié qu’une seule nouvelle : Les prisonniers. Il est surtout connu pour son travail de traducteur, principalement Robert Silverberg et J.G. Ballard. Il a également rédigé quelques articles dont plusieurs sur José Moselli. Sa nouvelle est peut-être originale en 1958 1958 , mais elle risque fort d’en décevoir plus d’un. Son héros, Ralph, est prisonnier avec quelques compagnons. Son angoisse est perceptible. Je dirais même palpable. Et il ne se passe quasiment rien à part ça, mais l’originalité réside dans la personnalité du héros qui est un chien. Hé oui, je vous l’avais bien dit : c’est une ficelle qui a été utilisée de nombreuses fois.

Robert Bloch nous régale avec Si vous n’y croyez pas... d’une histoire de parapsychologie pleine d’humour. Deux professeurs d’université s’affrontent sur l’existence ou non des pouvoirs paranormaux tels la télékinésie ou la prescience. Mais tout ne se passe pas au mieux de leurs souhaits et le résultat sera passé sous silence.

Comme à chaque fois que je lis une de leurs œuvres, H. Kuttner et C. L. Moore me déçoivent un peu. La machine à deux mains est une nouvelle très intéressante sur la culpabilité et elle serait très réussie si elle n’était interrompue par deux pages d’explications sur le contexte. Comment l’humanité en est arrivée là : un assassin sera suivi par une machine humanoïde qui finira par la condamner à mort.

La route est ouverte, la nouvelle de Lee Corey est une bel exemple de fiction scientifique réussie. Écrite en 1955 1955 , quelques années avant le premier vol habité dans l’espace, elle nous raconte comment une société peu passer à côté de grandes avancées scientifiques et techniques. Pas de grande aventure ici. Simplement un ingénieur qui se bat avec le système pour faire valoir ses idées sur l’expérimentation des fusées pilotées par un être humain et qui se voit essuyer refus sur refus.

En bref : Voilà un numéro de Fiction que je ne regrette pas de m’être procurer et que je vous invite à lire si vous le pouvez.

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[1Et je ne m’aperçois que longtemps après que j’ai oublié de noter dans quel éditorial ou interview, j’ai bien pu lire cette opinion de Gérard Klein : http://www.quarante-deux.org/archives/klein/prefaces/Science-Fiction_les_frontieres_de_la_modernite/ mais j’ai beau relire cette préface, je ne retrouve aucune trace d’une quelconque opinion négative de Gérard Klein vis-à-vis de la science-fiction française. Cet article aurait-il été remanié depuis ma remarque désobligeante ?